26 January 2023
La Tome des Bauges AOP, fromage du terroir savoyard
Moins connu que ses voisins du Mont Blanc, du Beaufortain ou de Chartreuse, le Massif des Bauges gagne à être découvert ! Ce massif de moyenne montagne, situé entre Chambéry,…
Existe-t-il un lien entre géologie et alpages ? Cette question, les fondateurs et animateurs du Géofestival alpin en ont fait une de leur marque de fabrique. Ce n’est pas un hasard puisque ce festival alpin, dont l’objectif est de rendre la géologie accessible à tous, est né dans le Beaufortain. Gilles De Broucker, un des piliers du festival, en est un des spécialistes.
Cette année, le Festival se déroule du 19 juillet au 2 août entre Chamonix et Courmayeur et propose des géorandos et des conférences itinérantes sur un thème majeur de l’histoire de nos territoires, « D’où viennent les Alpes ? ».
Pour mieux comprendre le massif alpin et la formation des paysages, il faut se plonger dans le temps long. Et même très long. Et se préparer à écouter de très belles histoires de mers, d’océans, de chaînes de montagne et de roches, de chaos et de résurrection, racontées par les cailloux rencontrés au fils des balades en montagne. Et retrouver dans les récits des géologues-accompagnateurs, les traces et les empreintes des débuts du monde.
Les Alpes avant les Alpes, c’était quoi ?
Pour résumer, celles qu’on voit aujourd’hui sont le résultat de la superposition de deux chaînes de montagnes qui se sont succédées dans le temps. Notamment celle des massifs anciens, tels que le Mont-Blanc ou Belledonne, avec des roches vieilles de 600 à 300 millions d’années qui culminaient alors presque aussi haut que l’Himalaya. Elle a été aplanie, érodée, tout comme les massifs les plus anciens, la Bretagne, les Vosges ou le Massif central. Cette ancienne chaîne de montagne en France se situait il y a 300 millions d’années… proche de l’équateur ! Puis elle a migré au gré de la dérive des continents et des millions d’années, graduellement vers le Nord, jusqu’à sa position actuelle. Elle a alors entamé son grand voyage au travers de plusieurs climats et environnements.
À la latitude du Mali, la mer alpine va venir envahir le futur territoire alpin aplani il y a environ 250 millions d’années, et déposer une séquence de roches sédimentaires.
Le paysage alpin se construit et se raconte volontiers en 3 temps, ou trois histoires successives. En géologie, le temps se compte en millions d’années et le Beaufortain en est un très bon exemple.
Il y eu d’abord le temps de la fabrication des roches : de 600 à 70 millions d’années. Le caillou le plus vieux du massif du Beaufortain (Mirantin) a 600 millions d’années et s’est formé au fond d’une très ancienne mer.
Puis vint le temps de la tectonique et de l’affrontement des plaques. Les Alpes sont nées de la collision entre les plaques Eurasie et Afrique, de 50 à 10 millions d’années. En s’encastrant sous la seconde, « le matériel de la mer alpine » émerge et crée des reliefs. En profondeur se produisent d’innombrables failles, cassures, plis…
Enfin, plus récemment (pendant les deux derniers millions d’années), vint le temps de l’érosion par une trentaine de grands glaciers. C’est à cette période que se sont fabriqués nos paysages actuels, creusées nos vallées, rabotés nos cols.
C’est sur les dépôts sédimentaires de la Mer alpine que s’est créée la vie d’alpage. Gilles De Broucker choisit des images très parlantes pour expliquer les grands bouleversements à l’origine de nos paysages alpins. « Entre Chamonix et Grenoble, on peut imaginer la formation des paysages comme des ascenseurs d’immeubles. Quand les massifs de Belledonne et du Mont blanc sont sortis de terre, repoussant sur le côté les sédiments de Chartreuse et des Bauges, le Mont blanc est monté au 10ème étage, Belledonne au 7ème et le nord du Beaufortain, coincé entre les deux, de Beaufort et Mégève, n’a pu atteindre que le 4ème ! »
Et c’est une chance pour lui puisque ces mouvements de remontée à une altitude modérée ont limité l’érosion des grands glaciers et lui ont permis de préserver un tapis de roches sédimentaires par-dessus les roches de l’ancienne chaîne de montagnes. Alors qu’en Belledonne et Mont-Blanc, la surrection* plus haute a permis aux grands glaciers de décaper toutes les roches sédimentaires jusqu’à l’os des roches dures de l’ancienne chaîne de montagnes ! Ces roches dures anciennes aux pentes raides ne sont recouvertes que de sols rachitiques (Belledonne par exemple) pour moutons et chamois, alors que le Beaufortain comme les Bauges devenaient le paradis de tendres sédiments où les glaciers ont lentement raboté en pentes douces ces territoires de mer alpine, engendrant une géométrie idéale pour « le plancher des vaches » sur lequel ont pu se développer des sols riches et épais. CQFD !
Revenons à la genèse des terres d’alpages : les sols bruns issus de ces sédiments de la mer alpine sont devenus le lieu idéal pour accueillir tout un cortège floral. Les alpages étaient nés, permettant des milliers d’années plus tard le développement des activités humaines et du pastoralisme dans ces jardins d’altitude.
Les bons fromages de montagne tiennent donc leur goût et leur qualité d’une très vieille histoire de cailloux, de mer alpine et de tectonique des plaques.
Fantastique et passionnant. Si vous voulez en savoir plus vous pouvez toujours faire un tour à la Coopérative de Beaufort où toute cette histoire est mise en scène et racontée avec talent.
Ou, dès cet été, participer à la conférence itinérante et l’une des 32 Géorandos du prochain Géofestival alpin dont c’est la 6ème édition. Vous le ne regretterez pas ! C’est pédagogique, ludique et ça s’adresse à tout le monde, des plus jeunes ou plus anciens, à condition de marcher un tout petit peu, ou parfois un peu plus !
Rendez-vous au Géofestival du 19 juillet au 2 aout entre Chamonix et Courmayeur !
surrection : Soulèvement lent et progressif d’une zone de l’écorce terrestre.
Catherine Claude – Axiuba Communication
Crédit photo : Catherine Claude